La consommation d’alcool associée à des lésions cérébrales vasculaires et à un déclin cognitif : une étude de grande ampleur basée sur des autopsies alerte sur les effets à long terme de l’alcool
Une étude brésilienne d’une ampleur inédite, publiée dans Neurology, vient de confirmer des associations significatives entre la consommation chronique d’alcool et des atteintes cérébrales liées aux troubles cognitifs et à la démence. Menée sur 1 781 cerveaux d’adultes autopsiés à São Paulo, cette étude montre que même après l’arrêt de la consommation, les effets sur le cerveau perdurent.
Lésions neuropathologiques observées
L’analyse neuropathologique a porté sur les principales lésions associées aux démences : dépôts amyloïdes, dégénérescences neurofibrillaires (tau), corps de Lewy, sclérose hippocampique, protéine TDP-43, angiopathie amyloïde cérébrale, infarctus lacunaires et artériolosclérose hyaline (atteinte des petites artères).
Catégorisation des consommations
Les consommations ont été évaluées sur les trois derniers mois de vie selon les déclarations des proches. L’unité utilisée dans l’article est la dose standard américaine (14 g d’éthanol pur). Pour le public français, les équivalences suivantes s’appliquent :
• 1 “dose” américaine = 1,4 verre standard français
• Consommation modérée : ≤ 7 doses/semaine = jusqu’à 10 verres français/semaine
• Consommation excessive (heavy): ≥ 8 doses/semaine = ≥ 11 verres français/semaine
• Ancien buveur excessif : arrêt de la consommation au cours des 3 mois précédant le décès, après une période de consommation excessive
Résultats clés :
• Artériolosclérose hyaline (lésion des petites artères cérébrales) : retrouvée plus fréquemment chez les consommateurs modérés (OR 1,60), excessifs (OR 2,33) et anciens buveurs excessifs (OR 1,89), comparés aux abstinents.
• Dégénérescences neurofibrillaires (tau) : davantage présentes chez les buveurs excessifs (OR 1,41) et anciens buveurs excessifs (OR 1,31).
• Réduction de la masse cérébrale : significativement plus faible chez les anciens buveurs excessifs (−4,45 g/cm, p = 0,033).
• Altération cognitive (CDR-SOB) : uniquement significative chez les anciens buveurs excessifs (+1,31 point, p < 0,001).
Un mécanisme vasculaire identifié
Les analyses de médiation montrent que le lien entre consommation d’alcool et capacités cognitives est entièrement médié par l’artériolosclérose hyaline, renforçant l’hypothèse d’un impact vasculaire de l’alcool sur la cognition.
Des effets qui perdurent après l’arrêt de la consommation
Fait marquant : les anciens buveurs excessifs restent les plus touchés, à la fois sur le plan neuropathologique et cognitif. Ce résultat suggère que l’arrêt de la consommation ne suffit pas à inverser les effets vasculaires et neuronaux induits par l’alcool, du moins à un stade avancé.
À retenir :
Cette étude renforce l’idée qu’il n’existe aucun niveau de consommation sans risque pour la santé cérébrale, conformément à la position de l’OMS. Elle souligne aussi la nécessité de prévenir la consommation excessive d’alcool bien avant l’apparition de troubles cognitifs, en tenant compte de ses effets vasculaires silencieux mais délétères.